Les Galères de Brest Sans Filtre

Les Galères de Brest Sans Filtre

Derrière l’écran : orchestrer la gouvernance numérique entre collectivités sans finir KO

Brest comme vous ne l’avez jamais vue

21 août 2025


Quand plusieurs mairies s’assoient à la même table digitale

Imaginez quatre mairies autour d’une vieille table de réunion, café filtre de rigueur et dossiers jamais vraiment droits. Tout le monde rêve d’applications fluides, de budgets moins crispés et de hackers obligés d’aller voir ailleurs. La mutualisation numérique entre collectivités, c’est ça : des outils partagés, une force collective, mais… aussi la bande-son imprévisible des compromis et des codes postaux.

Ce n’est pas qu’une histoire de technos performantes ou de services dématérialisés. Non, ça sent la vraie vie, celle où les agents râlent sur Teams qui rame, où chaque commune veut garder “sa” couleur d’interface, et où la facture cloud file aussi vite qu’un grain sur le port de Commerce. Mutualiser, c’est tout un art. Et derrière l’art, une gouvernance.

Gouvernance mutualisée : de quoi parle-t-on au juste ?

La “gouvernance”, mot qui fait lever les yeux au ciel les plus blasés, c’est simplement : comment on décide, qui fait quoi, qui met la main à la poche, et qui garde la clé USB finale. Dans une mutualisation numérique, c’est crucial. Car la plupart des galères arrivent quand on croit pouvoir tout régler après… dans le “prochain comité”.

Chiffre-clé Signification
60% D’après la Banque des Territoires, plus de 60% des collectivités ayant mené une mutualisation informatique admettent que la gouvernance fut l’un des chantiers les plus délicats (source : Banque des Territoires).
15 % Économies réalisées sur le budget numérique en modalité mutualisée (moyenne observée dans le Grand Ouest, selon l’ADULLACT).

Quels modèles de gouvernance ? Le grand écart breton (et ailleurs)

Il existe autant de modèles que de marées dans la rade de Brest :

  • Le GIP (Groupement d’Intérêt Public) : armature solide, statut souple, fonctionnement industriel. Exemples célèbres : le GIP SIB (Rennes, Saint-Brieuc), moteur de mutualisation d’infrastructures/logiciels pour la santé publique et les collectivités (SIB).
  • Le syndicat mixte : Montures légales ancestrales, popularisées par les syndicats d’énergie numérique (Mégalis Bretagne). Gouvernance plus “politique”, mais un pouvoir de frappe tout-terrain.
  • La convention simple : Mode “mains dans le cambouis”. Quelques communes, un chef de file, une convention. Flexible, mais fragile si les maires ne s’entendent pas un matin de tempête.

Les règles de la gouvernance qui marchent (vécu et terrain à l’appui)

  • Règle n°1 : Le clair, c’est précieux.
    • Qui choisit l’outil numérique ? Le prestataire ? Les élus ? Un comité d’experts ?
    • Posez des procédures écrites, adaptées – et assurez-vous que tout le monde comprenne le jargon. Le RGPD n’aime pas l’à peu près.
  • Règle n°2 : Chaque voix compte, mais pas toujours pareil.
    • Pour les “grandes” décisions (stratégie, création d’une nouvelle plateforme), chaque collectivité peut avoir une voix égale. Mais pour diviser les coûts ? Plutôt en fonction de la taille des collectivités ou du nombre d’utilisateurs.
  • Règle n°3 : Communication sans filtre.
    • L’intranet partagé, c’est bien (quand il marche). Mais pensez newsletter, ateliers réguliers, supports vulgarisés pour les élus qui n’ont pas le temps/l’envie de lire 30 pages de PowerPoint.
  • Règle n°4 : L’humain d’abord.
    • La peur du “logiciel imposé” est partout. Co-construisez les outils, ne faites pas du “top-down” à la brute.

Une organisation type : qui fait quoi au quotidien ?

Concrètement, dans une gouvernance mutualisée réussie, on retrouve souvent :

  1. Un comité de pilotage
    • Constitué d’élus, DSI, agents, parfois d’experts extérieurs. Il trace la feuille de route (choix stratégiques, investissements, sécurité, risques cyber, harmonisation des outils).
  2. Des groupes-projets / ateliers métiers
    • Les gens “du terrain”. Ils adaptent les solutions aux réalités des agents (finances, état-civil, voirie, etc.). Ils remontent les bugs, organisent la formation et secouent le cocotier en cas d’oubli.
  3. Une cellule technique mutualisée
    • Quelques agents informatiques dédiés mutualisés, sorte de commando d’intervention pour les incidents, la veille technologique, l’assistance aux utilisateurs. Ils connaissent toutes les astuces pour faire tourner les PC récalcitrants, même le lundi matin.
  4. Un référent “gouvernance”
    • Parfois, désigné comme le “chef d’orchestre” (et souvent pompier de service), il veille au respect des décisions, planifie les réunions (pas trop de PowerPoints, pitié), assure la circulation de l’info et évite que la mutualisation ne s’enlise dans la routine.

Les défis concrets de la gouvernance numérique à plusieurs

  • Des rythmes politiques décalés : une commune change d’équipe et tout le plan numérique prend l’eau. D’où l’importance d’un pacte clair dès le départ.
  • La résistance culturelle : dans les Finistère(s) ou ailleurs, laisser une autre mairie choisir un logiciel paraît parfois pire que d’adopter le blason du voisin.
  • Les moyens : qui sort le chéquier ? : le budget numérique, ça peut faire tourner de l’œil. Selon l’AITF (Association des Ingénieurs Territoriaux de France), la mutualisation permet dans certains cas de baisser jusqu’à 30% les coûts d’achat de logiciels... Mais, attention, la maintenance partagée peut vite creuser le différentiel si la répartition n’est pas transparente (AITF).
  • La sécurité : une faille dans un outil mutualisé = incident pour tout le monde. Les enjeux cyber sont décuplés, il faut donc une gestion des risques béton, avec backups, audits et une équipe dédiée.

Les astuces et bons plans (qui évitent de finir en réunionnite)

  • S’inspirer des pionniers :
    • Mégalis Bretagne : le syndicat mixte a mutualisé l’accès très haut débit et la gestion des marchés publics sur 1 200 collectivités, avec un modèle de gouvernance tournant selon les sujets, et des solutions co-financées selon les usages réels. À Brest, la plateforme bretonne d’open data a vu les coûts d’hébergement divisés par 2 entre 2018 et 2022 (source : Mégalis).
    • Les coopératives d’inclusion numérique (Projets ADN Ouest) expérimentent l’implication d’agents “ressource” dans chaque commune, pour éviter la panne sèche d’accompagnement et d’usage, sujet clé selon la Agence Nationale de la Cohésion des Territoires.
  • Opter pour la charte de gouvernance :
    • Noir sur blanc. Tout est consigné : périmètre du projet, règles de décision, calendrier de réunions, modes d’arbitrage... et modes de sortie si besoin. Plusieurs syndicats du Morbihan s’y sont mis après des embrouilles homériques pour des clés de WiFi mutualisé (témoignages recueillis par Ouest-France en 2023).
  • Mettre en place un socle commun... mais évolutif :
    • Un exemple : la mutualisation du support technique sur horaires “élastiques”, pour coller aux agendas très différents des agents (préfecture, CCAS, écoles…).
  • Favoriser la formation croisée :
    • Former les agents/élus à l’outil ET à la gouvernance. Comprendre comment ça tourne… évite pas mal de contestations.

Et demain ? Mutualisation, territoires et horizons d’embruns numériques

On va pas se mentir : la mutualisation numérique entre collectivités, ce n’est pas un long fleuve tranquille. Mais bien menée, elle sort les mairies de la galère budgétaire, leur donne du poids face aux grands éditeurs, et accélère l’innovation locale. Dans le Finistère comme à l’autre bout de l’Hexagone, il y a urgence à avancer, surtout pour survivre au tsunami des cybermenaces et de la dématérialisation à marche forcée.

Le secret ? Acceptons qu’organiser la gouvernance, c’est accepter la part d’imprévus : un maire qui change, une panne qui tombe au pire moment, un agent brillant qui part élever des chèvres à Plougonvelin. Refuser la lourdeur, garder le lien humain et la réactivité des petits comités, c’est ce qui fait, finalement, la réussite des mutualisations les plus solides... même sous le crachin brestois.

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